Abû Djamra rapporte ce qui suit : « Ibn ‘Abbâs nous a dit : « Voulez-vous que je vous raconte la conversion à l’Islam de Abû Dharr ». « Certes oui », répondîmes-nous. « Eh bien ! reprit-il, Abû Dharr m’a dit : « J’étais un homme de la tribu de Ghifâr. La nouvelle nous parvint qu’un homme qui prétendait être prophète est apparu à La Mecque. « Va, dis-je à mon frère, trouver cet homme, cause avec lui et reviens me donner des renseignements sur son compte ». Mon frère partit, rencontra cet homme et, quand il fut de retour, je lui demandai ce qu’il en savait. « Par Allah, me répondit-il, j’ai vu un homme qui ordonne le bien et défend le mal ». « Cela, répliquai-je, ne satisfait pas ma curiosité ». Et aussitôt, prenant une besace et un bâton, je me rendis à La Mecque. Je ne connaissais pas le Prophète (ç) et, comme j’avais peur de demander de ses nouvelles, j’allai boire de l’eau de Zamzam et m’installai devant la Ka’ba. ‘Alî, (qui avait à peine une dizaine d’années) venant à passer près de moi, dit : « Cet homme semble être un étranger ». « En effet », lui dis-je. « Viens dans ma demeure », me répondit-il. Je partis avec lui sans qu’il me demandât aucun renseignement sur mon compte et sans que je lui en donnasse. Le lendemain matin, je me rendis au Temple pour m’informer du Prophète (ç), mais il n’y eut personne qui pût me renseigner à son sujet. ‘Alî, venant à passer de nouveau près de moi, dit : « N’est-il pas tant que l’homme sache où doit être son gîte aujourd’hui ? » « Non », répliquai-je. « Alors viens avec moi », reprit-il. Il (m’emmena et) me dit : « Qui es-tu ? Quelle est la raison qui t’a conduit dans cette ville ? » « Si tu me promets le secret, je te le dirai », répondis-je. « Tu as ma parole », ajouta-t-il. Alors je lui racontai que nous avions appris qu’il y avait dans cette ville-ci un homme qui prétendait être prophète, que j’avais envoyé mon frère causer avec lui, mais qu’à son retour, mon frère n’avait pas satisfait ma curiosité, ce qui m’a incité à vouloir rencontrer cet homme. « Eh bien ! Tu tombes juste, s’écria Ali, je vais de ce pas chez lui ; suis-moi donc, entre là où j’entrerai. Si je vois quelqu’un qui me semble dangereux pour toi, je m’arrêterai le long du mur comme pour rajuster mes sandales. Dans ce cas, poursuis (seul ta route) ». ‘Alî marcha devant moi ; je le suivis et entrai avec lui chez le Prophète (ç). Expose-moi la doctrine de l’Islam », dis-je au Prophète (ç). Il me l’exposa et, sur place, je me convertis à l’Islam. « O Abû Dharr, me dit-il, garde le secret et retourne dans ton pays. Le jour où tu apprendras que notre message a fini par s’imposer, reviens ici ». « Par Celui qui t’a envoyé prêcher la Vérité, m’écriai-je, je vais crier bien fort ma nouvelle croyance en plein public ». Je me rendis alors au Temple où se trouvaient des Quraychites, et dis : « O gens de Quraych, j’atteste qu’il n’y a de dieu qu’Allah et que Mohammed est Son serviteur et Son Envoyé ! ». « Qu’on se jette sur cet apostat ! », s’écrièrent les quraychites. On se jeta sur moi, on me frappa pour me tuer, mais Al-‘Abbâs, survenant, se précipita vers moi et, se tournant ensuite vers mes agresseurs, il leur dit : « Melheureux ! Vous alliez tuer un homme des Ghifâr. Or, votre commerce dépend des gens de Ghifâr, car vos routes passent sur leur territoire ». Aussitôt on s’éloigna de moi. Le lendemain matin, je revins et répétai ce que j’avais dit la veille. « Qu’on se jette sur cet apostat ! » cria-t-on encore. On me traita de la même façon qu’on m’avait traité le jour précédent, et Al-‘Abbâs ; survenant, se précipita vers moi et tint le même langage que la veille. Tel fut, ajouta Ibn ‘Abbâs, le début de la conversion à l’Islam de Abû Dharr ».